Réunions de décembre des banques centrales : pic de pessimisme et pic d’optimisme

11 décembre 2024

<strong>Réunions de décembre des banques centrales : pic de pessimisme et pic d’optimisme</strong>

Par Kevin Thozet, membre du comité d’investissement

Banque nationale suisse (BNS) – 12 décembre

Les marchés s’attendent à ce que la BNS baisse ses taux de 50 points de base et ramène ses taux directeurs à 0% au cours des six prochains mois. Avec une inflation inférieure à l’objectif (inflation globale de 0,7% et inflation sous-jacente de 0,9%), une croissance économique atone et une monnaie forte, la BNS devrait chercher à devancer la BCE dans son cycle de baise afin d’entraver la trajectoire ascendante du franc suisse. Mais ce dernier semble plus sensible à la trajectoire de l’or qu’aux différentiels de taux d’intérêt, l’efficacité de cette stratégie reste donc à démontrer.

La Banque centrale européenne (BCE) – 12 décembre

Les marchés s’attendent à une baisse de taux de politique monétaire de 25 points de base cette semaine, et ensuite une par réunion jusqu’à atteindre 1,75% à l’été prochain. La principale interrogation réside dans la possibilité de voir une super baisse de 50 points de base sur cette période.

Selon nous, les craintes de ralentissement économique liées aux possibles tarifs douaniers de M. Trump et à l’incertitude politique dans la région font que le taux d’atterrissage pourrait être inférieur aux attentes du marché (soit 1,5% ou moins). Pour autant, nous estimons qu’une baisse de 50 points de base est peu probable pour le moment, compte tenu de la croissance économique qui a surpris à la hausse au troisième trimestre, des perspectives d’un cycle monétaire américain moins favorable depuis la dernière réunion de la BCE et qu’il est trop tôt pour intégrer les effets négatifs des éventuelles futures politiques Trump 2.0.

La BCE pourrait néanmoins signaler son intention de passer d’une « approche réunion par réunion » à une « volonté de se rapprocher du taux neutre » afin de prendre en compte les risques associés à la faiblesse du sentiment des consommateurs et aux incertitudes politiques. Ce faisant, elle pourrait rétablir une certaine forme de vision prospective sur une trajectoire de politique monétaire plus accommodante.

Enfin, le mois de décembre verra également la fin des réinvestissements des obligations détenues dans le cadre de ses programmes d’achats (tant pour l’APP[1] que le PEPP[2]). Ainsi, à partir du 1er janvier 2025, le bilan de la BCE diminuera de 40 milliards d’euros par mois. La disparition d’un acheteur insensible aux prix, 10 ans après le début de l’APP, appelle également une certaine forme de prudence sur les marchés des taux euro. En effet, 2025 devrait être une nouvelle année record sur le front des émissions d’obligations d’États ;  600 milliards d’euros d’émissions nettes sont attendues l’an prochain et les trajectoires déficitaires de pays tels que la France ne devraient pas être aussi bénignes qu’initialement prévu. Dans ce contexte les obligations souveraines européennes ne devrait pas être particulièrement plébiscitées par les investisseurs, d’autant qu’il est possible de trouver ailleurs de meilleures opportunités de rendement et que certains émetteurs, comme la France, pourraient voir leur notation se dégrader .

La Réserve fédérale (Fed) – 18 décembre

Contrairement à la BCE – compte tenu d’un environnement de croissance économique solide aux Etats-Unis – ce sont les données relatives à l’inflation qui doivent être au centre des préoccupations de la Fed. Les marchés n’intègrent pas pleinement la possibilité d’une baisse de 25 points de base lors de la réunion de décembre et anticipent tout juste trois baisses de taux au cours des six prochains mois.

Si nous anticipons une seconde baisse de taux consécutive de 25 points de base pour la Fed la semaine prochaine, nous  estimons qu’elle devrait mettre un terme à son cycle de baisse des taux de politique monétaire au cours du premier trimestre 2025 sur un plateau de 4%.

À court terme, il est peu probable que la Fed cherche à pressentir ce que pourront être les politiques de la future administration américaine. Elle devrait donc, pour le moment, rester sur la voie accommodante qu’elle a tracée depuis sa première baisse de taux en septembre dernier.

Toutefois, à moyen terme (un à deux trimestres), si les mesures Trump 2.0 poussaient la croissance, c’est-à-dire des prix et un déficit à la hausse alors que l’écart de production est largement résorbé, la Fed pourrait adopter un ton restrictif.

À court terme, la courbe des taux américains devrait se pentifier, les marchés ne reflétant pas pleinement les baisses de taux d’intérêt attendues, ni les pressions inflationnistes persistantes. Actuellement, les marchés obligataires reflètent un scénario d’inflation relativement bénin.

Impact en termes de gestion obligataire

En conclusion, nous demeurons prudents sur les marchés de taux des pays développés. 

Les attentes de marché quant aux baisses de taux de la BCE sur le court terme sont optimistes et les marchés se sont empressés à intégrer l’exceptionnalisme américain, ainsi nous préférons les taux américains aux taux euros sur les échéances courtes.

Nous restons largement à l’écart des obligations souveraines des marchés développés qui, malgré les circonstances, offrent un maigre rendement compris entre 4% (en USD) et 2% (en EUR) pour les pays cœurs – et guère plus pour les pays dits « périphériques » ou « semi-périphériques » (pour l’instant).

Enfin, une courbe de taux plate et la question persistante de l’inflation nous incitent à préférer les taux réels (c’est-à-dire liées à l’inflation) aux taux nominaux.

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