Muzinich & Co. : Perspectives d’Erick Muller, sur la réunion du juin de la BCE le 9 juin 2022

9 juin 2022

Muzinich & Co. : Perspectives d’Erick Muller, sur la réunion du juin de la BCE le 9 juin 2022

La réunion de ce jeudi sera un exercice important de communication pour fournir une orientation prospective plus précise sur les taux qui doivent être modifiés. Le blog de la présidente Lagarde publié le 23 mai a pratiquement mis fin à un cycle de discussions au sein du conseil des gouverneurs sur la voie à suivre pour sortir des taux d’intérêt négatifs le plus rapidement possible. À la suite de ce blog, les taux d’intérêt à terme ont été relevés pour évaluer 130 points de base de hausses de la BCE avant la fin de cette année. Pour le président Lagarde, le séquençage a toujours été important. Nous pouvons donc nous attendre à ce que la réunion annonce officiellement la fin du programme d’achat d’actifs (APP) dans les premiers jours de juillet. Cela laissera quelques semaines avant la réunion du 21 juillet, où une première hausse des taux de 25 points de base devrait avoir lieu. Nous nous attendons également à ce que le président Lagarde indique clairement que cette première hausse sera immédiatement suivie d’une autre lors de la réunion de septembre.

Le dernier discours de Philip Lane semble expliquer qu’une hausse « graduelle » des taux d’intérêt fait référence à des hausses trimestrielles. Cependant, nous pensons qu’il existe un risque important de mauvaises surprises concernant les chiffres de l’inflation dans les prochains mois et qu’une hausse plus rapide pourrait être justifiée. Le choix sera de garder un séquençage trimestriel avec une étape de 50bp comme option ou d’accélérer avec des mouvements de 25bp en réunion « intermédiaire ». Selon nous, quatre hausses de 25 points de base chacune sont attendues lors des réunions de juillet, septembre, octobre et décembre, en réaction à la persistance d’une inflation élevée et à une légère baisse des prévisions d’inflation à moyen terme. Ce phénomène est visible dans le SPF (Survey of Professional Forecasters) et dans le SMA (Survey of Monetary Analysts) et constitue une réelle source d’inquiétude pour la BCE. Nous prévoyons également d’autres hausses de taux en 2023, le DFR (taux de facilité de dépôt) devant atteindre au moins 1,5 % au quatrième trimestre de l’année prochaine.

Il n’y a pas eu de mention explicite particulière de ce que pourrait être le taux neutre et s’il serait nécessaire d’aller au-delà de ce taux neutre. Il est certainement très difficile de savoir à ce stade où le resserrement devrait s’arrêter l’année prochaine avec autant d’incertitude mais, selon nous, le risque demeure de sous-estimer le plateau d’inflation à un niveau très élevé pour les deux prochains trimestres au moins. Des preuves anecdotiques montrent qu’au-delà des contraintes d’approvisionnement bien connues des secteurs producteurs de biens, de l’énergie et de certains prix alimentaires, il existe un effet d’aubaine où même des services ou des producteurs non directement touchés augmentent leurs prix pour profiter de la tendance générale.

Jusqu’à présent, les membres de la BCE n’ont pas fourni de détails sur la manière de contenir une éventuelle fragmentation financière qui résulterait d’un resserrement rapide des taux d’intérêt dans un contexte de ralentissement de la dynamique macroéconomique. Le président Lagarde a fait référence à l’expérience passée où de nouveaux outils ont été créés et ont été efficaces lorsqu’ils étaient nécessaires. Il est peu probable que cela satisfasse les marchés qui voudront entendre plus de détails sur ce qui est possible et comment un tel nouvel outil serait compatible avec la réduction de l’excès de liquidités qui commence en juin avec d’importants remboursements anticipés des opérations de refinancement ciblées à plus long terme (TLTRO), parallèlement à l’arrêt des achats nets d’actifs. Cela devrait retenir l’attention des marchés, car les spreads périphériques se creusent et les rendements des bunds ont augmenté de 35 points de base depuis le blog du président Lagarde du 23 mai.

Le changement de posture de la BCE concernant la nécessité de sortir rapidement des taux d’intérêt négatifs et le consensus apparent derrière cette décision, a immédiatement aidé l’euro à trouver un plancher contre le dollar, ce qui devrait rassurer les « faucons », qui étaient clairement (et à juste titre) préoccupés par une chute de 8% de l’euro par rapport au dollar depuis janvier 2022 à la mi-mai 2022. Un ton ferme lors de la conférence de presse sur la détermination à ramener l’inflation près de l’objectif à moyen terme et des chiffres légèrement encourageants du secteur manufacturier dans la zone euro, devraient consolider l’euro au-dessus des récents planchers au cours des prochains mois.

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