Par Erick Muller, responsable des investissements et des produits chez Muzinich & Co
L’absence de modification des taux directeurs lors de la réunion d’aujourd’hui était largement attendue. Le message selon lequel la BCE « est en bonne position » a été répété lors de cette réunion, tout comme l’approche réunion par réunion et le processus décisionnel dépendant des données. La conférence de presse aurait pu être ennuyeuse, mais elle ne l’a pas été totalement.
Les perspectives économiques deviennent plus positives. Du moins dans la conférence de presse. Mais l’évolution de l’évaluation des risques pesant sur les perspectives économiques pourrait se refléter dans les projections économiques de décembre. La présidente Lagarde a souligné que trois risques s’estompaient : l’accord commercial entre l’UE et les États-Unis conclu cet été a réduit le risque de conflit commercial entre les deux puissances économiques (ce qui signifie une moindre incertitude économique liée aux droits de douane), le cessez-le-feu au Moyen-Orient (moins de risques pour les prix de l’énergie) et les négociations commerciales entre les États-Unis et la Chine qui ont pris une tournure plus positive aujourd’hui après la rencontre entre Xi et Trump (moins d’incertitude mondiale, notamment en ce qui concerne l’accès aux terres rares). Au niveau national, nous savons déjà que la BCE a intégré davantage de mesures de relance issues du budget allemand ainsi que l’augmentation des dépenses de défense dans toute l’Europe dans son scénario 2026-2027. Le PIB du troisième trimestre publié aujourd’hui a été légèrement supérieur aux prévisions, grâce aux performances surprenantes de l’économie française, tandis que l’Allemagne et l’Italie ont stagné. Les indicateurs PMI laissent présager un PIB légèrement plus élevé au quatrième trimestre qu’au troisième.
De plus, interrogée sur la qualité de la transmission, la présidente Lagarde a déclaré qu’elle fonctionnait bien, comme en témoignent les taux d’intérêt plus bas appliqués aux agents économiques. Avec un risque moins négatif lié à la demande extérieure pesant sur les perspectives, des mesures de relance nationales et une transmission harmonieuse de la politique monétaire, la confiance de la BCE dans le caractère approprié des taux actuels augmente visiblement.
En ce qui concerne l’inflation, la symétrie dans l’évaluation des risques est toujours très présente dans l’analyse. Il est intéressant de noter aujourd’hui un optimisme soutenu concernant l’inflation salariale. De nombreux indicateurs, dont le suivi des salaires de la BCE, mais pas seulement, indiquent une nouvelle modération de la progression des salaires pour les prochains trimestres. Parallèlement, nous savons que les effets de base feront baisser les chiffres de l’inflation au premier semestre 2026. Nous pourrions assister à une divergence plus importante que prévu actuellement des calculs annuels de l’inflation inférieure à 2 % au premier semestre 2026, ce qui laisse entrevoir la possibilité d’une nouvelle baisse « préventive » au cours du deuxième trimestre 2026. Cependant, grâce à une confiance accrue dans la dynamique économique et à la symétrie dans l’évaluation des risques d’inflation, la conférence de presse d’aujourd’hui a légèrement relevé la barre pour envisager une nouvelle baisse cette année et début 2026. Il faudrait un véritable choc négatif pour faire sortir la BCE de sa position confortable actuelle.
Les marchés sont restés globalement inchangés, les taux courts ont légèrement baissé de quelques points de base. L’euro s’est légèrement affaibli. Restez calme et continuez votre excellent travail, Madame la Présidente Lagarde !
Retrouvez l’ensemble de nos articles Business