Manager ou pompier-pyromane ?

2 janvier 2020

Manager ou pompier-pyromane ?

A la base, nous partons d’un principe, largement vérifié dans le monde du coaching, voulant que développer, amplifier, ce qui va déjà bien est incomparablement plus efficace et porteur que le réflexe classique consistant à s’attaquer à ce qui ne va pas, enfiler un bleu de travail, sortir sa caisse à outils et effectuer des réparations.

Ceci est totalement inefficace. Si vous procédez de la sorte, vous êtes un pompier-pyromane !

Si vous voulez éteindre un feu, il faut l’étouffer, d’une manière ou d’une autre, parce que si vous soufflez dessus, vous allez l’activer. C’est un principe physique qui veut que mettre de l’énergie quelque part amplifie le phénomène.

La pensée, l’attention, la concentration, représentent ici l’énergie. Si vous les focalisez sur un « problème », vous allez à coup sûr gonfler son importance, et plus vous vous concentrerez dessus, plus vous le verrez envahir votre monde.

C’est ainsi que l’on perd sa vision d’ensemble et occulte des solutions potentiellement efficaces, par le fait même qu’elles sortent du cadre, surtout de celui d’une pensée étroite.

Or, le manager, aujourd’hui, est soumis à des pressions constantes. Il doit faire face à des objectifs toujours plus ambitieux. Le top-management pose des exigences croissantes, le monde est mouvant, les contextes instables et « les marchés » sont perturbants et inquiétants (curieux, d’ailleurs, ce « les marchés » devenus comme un personnage, qui s’invite toujours à la Georges Clooney…).

La concurrence joue aux dents de la mer et a aiguisé ses longs couteaux, les exigences des collaborateurs connaissent aussi l’inflation (et pourquoi pas d’ailleurs ?), les équipes, à qui vous pensiez peut-être avoir offert le meilleur moteur, n’ont pas la bonne carburation et connaissent des ratés, malgré, ou à cause, de leurs vedettes… Non, non, cette liste n’est pas exhaustive : il y a encore, et entre autres, les collaborateurs qui dysfonctionnent, l’absentéisme galopant en tête d’un cortège d’échappatoires, sans oublier la grippe saisonnière, jamais à la bonne saison…

On voit ici combien la palette de ces dévoreurs d’attention est riche en couleurs, avec d’infinies nuances et variations subtiles : il y a de fait mille et une raison de se disperser et de galvauder son énergie.

Je suis resté marqué par l’expérience d’un dirigeant que j’ai eu le plaisir (…) de coacher à une certaine époque. Le pauvre était complètement conditionné. A l’image du chien de Pavlov, il sursautait à chaque fois qu’un mail en phase d’atterrissage faisait tintinabuler sa petite clochette. Son supérieur, specimen toxique, mais en partie inconsciemment, l’inondait de mails auxquels il fallait répondre dans les deux heures. Dimanche compris.

Cet homme voyait sa vie de famille menacée, avait jeté aux orties sa santé et sa forme, ce qui le mettait d’autant plus en danger ; quant à ses relations sociales, elles étaient reléguées aux oubliettes depuis belle lurette.

Si on voyait en lui un « problème », et que l’on ait voulu le régler en l’amenant à exprimer ses qualités, le moins que l’on puisse dire est que le résultat obtenu était l’inverse de ce qui était recherché. Sauf bien sûr, et tout aussi tristement, si le but était de l’éliminer…

Ainsi sombrent les plus faibles dans le sinistre burnout, tandis que les meilleurs s’en vont. Un gâchis phénoménal

Que l’on ait endossé le costume de la victime ou celui du bourreau, et si nos valeurs nous poussent à éradiquer le phénomène, il y a un gros travail de recentrage, d’équilibre, à entreprendre. On a peu de chances d’y arriver tout seul, même si, souvent, on se croit assez fort pour cela. Bonjour alors les œillères convergentes, comme disait l’un de mes estimés professeurs !

L’Intelligence émotionnelle implique ici de recourir à une aide extérieure, coach ou mentor, afin d’être capable de visionner la situation de façon panoramique, situer son propre comportement, analyser ses croyances erronées et « changer de lunettes ».

Dans les prochaines chroniques, nous verrons quels sont les éléments permettant de réaligner sa boussole émotionnelle sur un Nord souvent perdu.

La potion n’est pas amère, mais exige en particulier volonté, pugnacité, recentrage de l’ego aussi. Il y a urgence.

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