Le projet de suppression de l’ISF avait pour objet principal de rendre la France plus attractive aux grandes fortunes expatriées fiscales. Leur retour pour investir dans l’économie réelle était un des arguments. Quel rapport entre ISF et investissement dans l’économie réelle ? Qu’entend-on par économie réelle ? Qui donc investit dans cette économie réelle ? Nous vous proposons de répondre brièvement à ces questions qui ont, rappelez-vous, été au centre de la dernière campagne électorale présidentielle.
Force est de constater que 10 000 contribuables, représentant 35 milliards d’euros, ont fui la France en 15 ans, à cause de l’ISF. Sa suppression et son remplacement par l’IFI auraient pour but de corriger cette tendance à la fuite fiscale. Rappelons que l’Impôt de Solidarité sur la Fortune visait les particuliers français ayant un patrimoine net taxable supérieur à 1,3 million €. L’impôt considérait biens mobiliers et immobiliers, ainsi que tous les droits et valeurs du foyer fiscal.
Il a été supprimé et remplacé par l’IFI en automne 2017 (Loi de Finance 2018). Cet Impôt sur la Fortune Immobilière concerne tout foyer fiscal qui a un patrimoine immobilier estimé à plus de 1,3 million €. Tous les autres biens considérés par l’ISF sont exclus. Un argument essentiel à cette réforme a été l’encouragement à investir directement dans l’économie réelle par ceux qui choisiront, forcément, de revenir en France.
L’économie réelle est celle qui transforme l’argent en tout autre produit. Selon une vision étroite de sa définition, on peut inclure dans cette sphère tout échange de bien contre argent. Tout ce qui a trait au financement de l’économie (crédits, actions, obligations) relève alors de la sphère financière. Dans une vision plus élargie de l’économie réelle, la définition réduit la sphère financière à toute activité qui ne participe pas à une activité économique. La production de biens et services est l’essence même de l’économie. Sans projet ou développement, une entreprise ne peut évoluer. Pour cela, elle a besoin d’investissement. Cela peut se faire en fonds propres ou en se tournant vers l’extérieur en demandant un financement.
Or la tendance, depuis longtemps, est de constater que les actionnaires d’entreprises, souvent dans la classe des ultras riches, font pression pour avoir leurs dividendes payés. Il y a donc très peu de fonds propres disponibles. Et s’ils ont « fiscalement fui » la France, c’est leur pays d’accueil qui récoltera le produit taxable de leurs revenus. Reste alors l’épargne. Les Français sont bien connus pour en être champions. Cela concerne la catégorie de contribuables de la classe moyenne. Ils cherchent à éviter la surimposition de leur épargne. Le revenu de certains placements est très bas pour un impôt sur ce revenu trop élevé. Des systèmes comme le PEA ont donc été mis en place. Il faut absolument attirer les investisseurs particuliers à investir dans l’économie réelle.
Le comité d’évaluation des réformes de la fiscalité fait trois constats essentiels en matière de suppression de l’ISF :
Malheureusement, la crise sanitaire brouille les résultats quant à la répercussion sur l’investissement dans l’économie réelle. Par contre, une tendance voit de plus en plus le jour et il s’agit du financement participatif ou crowdfunding. Cela permet à la classe moyenne d’investir dans l’économie réelle et de bénéficier de réductions d’impôt, selon certaines conditions. Les PME, plus flexibles dans leur secteur, en sont essentiellement bénéficiaires. L’investisseur, qui choisit le projet où il souhaite investir, donne alors un sens à son investissement.
Constat est fait depuis les années 80, les ultras riches accumulent l’épargne. Cette épargne n’est pas investie dans l’économie réelle. Les grosses fortunes préfèrent investir en bourse, dans de grosses entreprises et amasser des dividendes. La classe moyenne commencerait-elle à se substituer aux ultras riches en matière d’investissement dans l’économie réelle ? L’investissement participatif prendrait-il un sens plus éthique que l’investissement en bourse et sa redistribution de dividendes ? La réforme de l’ISF a-t-elle atteint son but ? Ce seront certainement des questions que nous entendrons bientôt à l’approche de l’échéance 2022.
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