Entreprendre autrement

22 avril 2025

<strong>Entreprendre autrement</strong>

À l’heure où le monde cherche à concilier performance économique et utilité sociale, une autre manière d’entreprendre se dessine : l’entrepreneuriat social. Moins centré sur la recherche de profit que sur la création d’un impact positif, ce modèle séduit de plus en plus en Suisse, pays à la fois riche d’une tradition coopérative et ouvert à l’innovation. L’entrepreneuriat social — ou social entrepreneurship — se définit comme la création et le développement d’activités économiques dont l’objectif principal est de répondre à un besoin social ou environnemental. Ces entreprises adoptent des pratiques entrepreneuriales classiques (modèle économique, stratégie, innovation), mais leur finalité n’est pas la maximisation des gains, elle est avant tout humaine, sociétale ou écologique. L’entrepreneuriat social se décline en trois dimensions essentielles : une mission sociale ou environnementale clairement prioritaire, un modèle économique viable et autonome, et une gouvernance fondée sur la participation et la transparence.

La Suisse n’a pas attendu l’émergence de ce concept pour pratiquer un entrepreneuriat à vocation sociale. Le pays s’appuie depuis des décennies sur une solide tradition coopérative : dans les domaines de la distribution, du logement, de l’agriculture ou encore de l’énergie, des milliers de coopératives suisses fonctionnent selon des principes démocratiques et de partage de la valeur. Cette gestion collective, couplée à une vision à long terme et orientée vers le bien commun, forme le socle d’une économie sociale et solidaire qui inspire aujourd’hui les nouvelles générations d’entrepreneurs. Depuis quelques années, l’entrepreneuriat social connaît un renouveau en Suisse. Les jeunes diplômés, les cadres en reconversion et les innovateurs s’investissent dans des projets à impact, portés par des enjeux cruciaux : lutte contre l’exclusion, économie circulaire, agriculture régénérative, inclusion numérique, éducation alternative… Ce mouvement est soutenu par un écosystème en construction : des incubateurs comme Impact Hub (présents à Zurich, Lausanne, Genève), des concours dédiés à l’innovation sociale, des fondations et fonds à impact, mais aussi des institutions académiques qui intègrent ces enjeux dans leurs cursus. À Genève, Lausanne ou Bâle, des collectivités locales favorisent l’émergence de projets sociaux par des appels à projets, des espaces partagés ou des dispositifs de financement. Un signal fort en faveur d’un entrepreneuriat plus ancré dans les territoires et plus sensible aux fragilités du monde actuel.

Des défis à surmonter

Malgré cet élan, le chemin de l’entrepreneur social n’est pas dénué d’obstacles. Le manque de reconnaissance juridique constitue l’un des freins majeurs : contrairement à d’autres pays, la Suisse ne propose pas de statut spécifique pour les entreprises sociales. Ces structures doivent souvent choisir entre la forme associative (peu adaptée à une activité commerciale) ou l’entreprise classique (souvent en décalage avec leur mission sociale). L’accès au financement est également un défi, notamment pour les jeunes structures qui peinent à convaincre des investisseurs traditionnels. Enfin, la difficulté à valoriser l’impact social de manière tangible reste un point sensible pour obtenir le soutien de partenaires publics ou privés. Malgré ces défis, l’entrepreneuriat social suisse est en marche. Des plateformes comme SEIF (Social Entrepreneurship Impact & Finance), Ashoka Switzerland ou Swiss Triple Impact œuvrent à structurer le secteur, à connecter les acteurs et à renforcer la visibilité de ces initiatives. Ce mouvement reflète une aspiration plus large : celle d’une économie au service de l’humain et de la planète, où l’entreprise redevient un outil au service du lien social, de la durabilité et du sens. En Suisse comme ailleurs, l’entrepreneuriat social est bien plus qu’une tendance. C’est une réponse concrète et audacieuse aux défis de notre temps, portée par celles et ceux qui croient qu’un autre modèle est non seulement possible, mais déjà en train de se construire.

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