Par Jon Bell, gérant obligations internationales, Newton (BNY Mellon IM)
Les banques centrales sont à la croisée des chemins. Doivent-elles baisser les taux ? Quelles seraient les conséquences pour les marchés boursiers ? Dans l’environnement actuel, il est difficile d’imaginer que les banques centrales réduiront les taux d’intérêt de manière agressive. Deux thèmes macroéconomiques dominent : l’omniprésence des États et la concurrence entre les grandes puissances. Or, tous deux sont inflationnistes. Ces thèmes se manifestent dans l’intervention des banques centrales, les confinements liés à l’épidémie de Covid et l’évolution des prix de l’énergie et des denrées alimentaires. Mais il faut également citer la bataille entre les démocraties libérales et les autocraties, la guerre technologique et les conflits en Ukraine et au Moyen-Orient. La puissance de ces thèmes l’emporte sur les forces désinflationnistes mondiales telles que les défis démographiques, les niveaux élevés d’endettement et les bouleversements technologiques. Autrement dit, le génie de l’inflation est désormais sorti de sa lampe.
Après la crise financière, nous avons connu une longue période caractérisée par l’assouplissement quantitatif et la baisse des taux d’intérêt, un contexte qui a favorisé les valeurs de croissance, mais pesé sur les dividendes. Aujourd’hui, l’ère de l’argent gratuit est révolue et nous pensons que le retour à un environnement économique plus normal peut faire émerger de nouveaux leaders sur les marchés boursiers. D’une part, un contexte de taux d’intérêt plus élevés renforce la part des dividendes dans la performance. Le rendement du dividende est généralement moins volatil que le rendement du capital et la capitalisation des dividendes joue un rôle essentiel dans les performances à long terme des actions. L’importance des dividendes est apparue en pleine lumière après l’éclatement des bulles des valeurs de croissance – en 1930, après le krach boursier de 1929, mais aussi dans les années 2000. Cette remarque s’applique également aux années 1970, dernière période durant laquelle l’inflation représentait un enjeu de taille. La fin de « l’argent gratuit » est donc susceptible de bouleverser la hiérarchie des actions, et les années 2020 pourraient bien devenir une décennie où les dividendes sont essentiels aux performances.
Quand le transitoire est devenu permanent
L’événement le plus important des 10 dernières années s’est produit fin octobre 2021, lorsque le président de la Réserve fédérale, Jerome Powell, a admis que la hausse de l’inflation n’était pas « transitoire ». À partir de cette date, les taux d’intérêt à court terme ont augmenté significativement. Cela nous a ramenés à un environnement plus normal par rapport à la période qui avait suivi la crise financière mondiale. Mais en 2021, avant même les commentaires de Jerome Powell, des entreprises nous confiaient qu’elles augmentaient leurs prix pour suivre la hausse des coûts. Il était dès lors évident que l’inflation ne serait pas un phénomène transitoire. J’ai la ferme conviction que les 10 années postérieures à la crise financière constituent une parenthèse qui s’est refermée et ne préfigure en rien ce qui nous attend dans les 10 à 20 prochaines années.
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