Actualité sur les semi-conducteurs : nouvel épisode

26 septembre 2022

Actualité sur les semi-conducteurs : nouvel épisode

Par Chris Gannatti, Global Head of Research, WisdomTree

Nous avons récemment écrit un article sur les semi-conducteurs qui les abordaient dans la perspective des dépenses d’équipement et des politiques publiques visant à encourager davantage de dépenses d’équipement en vue d’une indépendance dans ce domaine.

Toutefois, nous avons négligé de parler au moins d’une partie du contexte géopolitique actuel.

Un regard simplifié sur la chaîne logistique des semi-conducteurs

En simplifiant une série assez complexe d’interrelations entre les pays, nous pouvons observer un triangle avec trois coins distinctifs[1].

  • Les fonderies : ces entreprises fabriquent les puces physiques. Il n’existe pas beaucoup d’acteurs car les dépenses d’équipement nécessaires pour entrer dans ce secteur sont extrêmement élevées. En outre, les fonderies n’ont pas toutes les mêmes capacités. Taiwan Semiconductor Manufacturing Co. (TSMC) est réputé pour la fabrication des puces les plus sophistiquées au monde. Samsung Electronics, Intel et Global Foundries sont d’autres acteurs importants.
  • Les entreprises dotées des droits de propriété intellectuelle : ces entreprises fabriquent et vendent différents plans et conceptions. ARM, la société actuellement détenue par SoftBank, est un exemple d’entreprise dotée d’une présence extraordinaire dans l’Internet des objets.
  • Les outils de conception assistée par ordinateur pour l’électronique (CAO électronique) : la CAO électronique représentait seulement 10 milliards de dollars en 2021, soit une petite partie du marché global des semi-conducteurs de 595 milliards de dollars, mais elle est essentielle à un fabricant de puces qui souhaite déterminer si une conception est réalisable avant la production. Cadence, Synopsys et Mentor Graphics sont les trois principaux acteurs de ce secteur. À eux trois, ils contrôlent environ 70 % du marché mondial.

Sous chacun des points sur le triangle, un long historique est fourni qui sert à démontrer l’expérience des entreprises dans ce secteur. Il est important de le connaître car c’est ce qui rend l’expertise des semi-conducteurs sophistiqués particulièrement difficile à copier pour un acteur extérieur, dans ce cas la Chine.

L’exemple d’ASML

La lithographie est le terme utilisé pour la gravure des conceptions sur le silicone qui permet le fonctionnement des transistors. Pour faire simple, si de nombreux transistors sont placés plus proches les uns des autres, alors la puce est plus efficiente et capable. La puce Apple M1 actuelle contient 16 milliards de transistors[2].

Le niveau de l’ingénierie de précision requise pour placer 16 milliards de transistors sur une petite surface est l’une des prouesses humaines les plus impressionnantes que le monde n’ai jamais connu. La version courte de l’histoire est qu’une entreprise néerlandaises baptisée ASML a pris un gros risque dans les années 2000 en se lançant dans la lithographie extrême ultraviolet ou lithographie EUV.

L’EUV était nécessaire car l’industrie avait besoin de longueurs d’ondes de la lumière plus courtes utilisées pour quasiment raser atome par atome le silicone afin de fabriquer des transistors suffisamment petits, essentiellement de 5 nanomètres. Cette lumière est générée en faisant clignoter une catégorie spécifique de laser 50 000 fois par seconde dans un bain d’étain fondu[3].

Développer l’EUV nécessitait tant de capital que seule une entreprise l’a fait : ASML. Les composants des machines EUV remplissent quatre avions Boeing 747 et sont obtenus auprès de plusieurs entreprises à l’échelle mondiale. Le fonctionnement de ces machines à l’échelle nécessite une profondeur d’expertise extraordinaire[4].

Compte tenu de l’essence-même du sujet, vous en avez probablement deviné les répercussions géopolitiques. Certains des composants des machines EUV proviennent des États-Unis. Ensuite, il existe la relation entre le gouvernement américain et le gouvernement néerlandais. En conséquence de négociations et de la situation actuelle, les machines EUV ne sont pas envoyées en Chine.

Le cas Nvidia

En août 2022, les États-Unis ont fait un pas supplémentaire afin de limiter les ambitions de la Chine dans le domaine de l’intelligence artificielle (IA) en imposant de nouvelles restrictions à l’exportation de semi-conducteurs très spécifiques[5]:

  • Nvidia sera limité dans sa capacité de vendre le processeur graphique A100 en Chine, à Hong Kong et à la Russie.
  • Nvidia sera également limité dans sa capacité de vendre son imminente série H100 de puces graphiques sur ces mêmes marchés.
  • Parmi les utilisateurs de cette puce A100 figurent Alibaba, Tencent et Baidu, les entreprises qui fournissent certaines des plus grandes infrastructures d’informatique dans le cloud en Chine.

Nvidia est la société la plus connue pour ces catégories de puces et à la date de rédaction de cet article, sa capitalisation boursière était la plus élevée de tous les fabricants de semi-conducteurs. Nous ne serions pas surpris si d’autres sociétés qui fabriquent des puces aux capacités similaires soient désignées à l’avenir.

Conclusion : la Chine peut-elle s’en sortir seule ?

En prenant du recul, il faut bien reconnaître que la Chine dispose de ressources massives. Dans ce cas, pourquoi ne produit-elle pas ses propres puces ? Nous n’écartons pas le fait que la Chine puisse absolument fabriquer ses propres puces. Mais la question qui se pose est de savoir combien de temps cela prendrait et quel serait leur degré de sophistication. Le processus EUV a nécessité des investissements massifs et environ 20 ans. ASML est capable de fabriquer ses machines et d’aider des entreprises telles que TSMC à opérer à l’échelle car la société a l’avantage d’avoir appris de toutes les erreurs qu’elle a commises. La Chine peut certainement engager des efforts dans la bonne direction, mais le simple fait de dépenser de l’argent n’aboutira pas à un processus EUV efficace capable de fabriquer les puces les plus sophistiquées, la clé étant « à l’échelle et sans taux de défaut élevé ».

Durant les 4 années à fin 2024, il est prévu que la Chine aura terminé la construction de 31 grandes usines de fabrication de semi-conducteurs. D’ici 2025, 40 % de la capacité de production mondiale de puces sur nœuds de 28 nanomètres devrait être chinoise[6]. Ces informations nous apprennent que la Chine réalise des investissements massifs dans des puces peu sophistiquées. Or il ne faut pas oublier que le monde en a également besoin.

S’il est très difficile pour un pays d’intégrer tous les maillons de la chaîne logistique des semi-conducteurs, nous observons des efforts notables qui devraient être poursuivis.

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[1] Source : Zeyi Yang. « Inside the software that will become the next battle front in US-China chip war. » MIT Technology Review. 18 août 2022.

[2] Source : https://en.wikipedia.org/wiki/Apple_M1

[3] Source : Clive Thompson. « Inside the Most Complicated Machine on the Planet. » MIT Technology Review. Volume 124, Numéro 6, novembre/décembre 2021.

[4] Source : Thompson, novembre/décembre 2021.

[5] Source : Liza Lin et Dan Strumpf. « Latest U.S. Chip Curbs Deliver Setback to China’s AI Ambitions. » Wall Street Journal. 1 septembre 2022.

[6] Source : Dan Strumpf et Liza Lin. « China Bets Big on Basic Chips in Self-Sufficiency Push. » Wall Street Journal. 24 juillet 2022.

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