Être journaliste, c’est s’engager à transmettre une information fiable, issue d’un travail rigoureux de vérification, d’analyse et de contextualisation. Ce métier repose sur une responsabilité fondamentale : fournir au public les clés pour comprendre le monde qui l’entoure. Pourtant, à l’heure où l’information circule en continu et se diffuse instantanément, cette exigence est parfois mise à mal, volontairement ou non. Dans l’idéal, un journaliste travaille avec recul et méthode, en se gardant d’imposer ses convictions personnelles. Il s’appuie sur des sources diversifiées, confronte les points de vue et laisse la place aux faits. Mais dans un contexte de polarisation croissante, cette rigueur semble parfois céder face à des intérêts idéologiques ou partisans.
La neutralité absolue n’existe pas. Chaque journaliste a une sensibilité, un parcours, une culture qui influencent naturellement ses choix éditoriaux. Toutefois, cette part de subjectivité n’excuse pas les manquements à l’éthique. Bien au contraire : elle impose une vigilance accrue, une capacité à douter, à se remettre en question et à distinguer clairement les faits des opinions. Ce que l’on observe aujourd’hui, dans certains cas, dépasse la simple erreur ou le biais involontaire. Il arrive que des professionnels publient délibérément des informations inexactes ou orientées, non pas par manque de temps ou de moyens, mais pour soutenir un discours politique ou idéologique. Lorsque cette frontière est franchie, ce n’est plus du journalisme : c’est de la manipulation de l’opinion. Ce type de dérive alimente un phénomène préoccupant : la défiance croissante du public envers les médias. Cette tendance, constatée dans de nombreux pays, s’explique en partie par la confusion entre journalisme d’investigation, commentaire d’actualité et activisme médiatique. À force de brouiller les repères, certains contributeurs discréditent la profession dans son ensemble.
Dans une société saturée d’informations, la légitimité d’un journaliste ne repose plus uniquement sur son titre ou son appartenance à une rédaction reconnue, mais sur sa capacité à démontrer sa rigueur, sa transparence et son honnêteté intellectuelle. Faut-il aller jusqu’à retirer le titre de journaliste à celles et ceux qui ne respectent pas les règles fondamentales de la profession ? La question soulève des enjeux complexes. Contrairement à d’autres corps de métier réglementés, le journalisme n’est pas encadré par un ordre professionnel doté de pouvoirs disciplinaires. La liberté de la presse, principe fondamental des démocraties, rend difficile toute forme de régulation autoritaire. Mais cela ne signifie pas pour autant que tout serait permis. Loin de l’idée de censure, il est légitime de réfléchir à des mécanismes de responsabilisation renforcée, capables de distinguer le journalisme véritable de la désinformation masquée.
Face à ces dérives, plusieurs leviers peuvent être mobilisés :
Le journalisme n’est pas un simple relais d’opinion : c’est une mission de service public, même lorsqu’elle s’exerce dans un cadre privé. Ceux qui l’exercent doivent être à la hauteur de cette responsabilité. La critique est légitime, le débat nécessaire. Mais l’honnêteté intellectuelle, la rigueur et la recherche de la vérité doivent rester les fondations inébranlables du métier. Réaffirmer ces principes n’est pas un combat corporatiste : c’est une nécessité démocratique. Car sans information fiable, sans contre-pouvoir crédible, le débat public s’effondre, et avec lui, la possibilité d’un vivre-ensemble éclairé.
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