Par Sara Devereux, Global Head of Fixed Income Group, Vanguard
Nous sommes entrés dans une nouvelle ère pour le segment obligataire, où les obligations sont de retour et offrent beaucoup plus de valeur. Les obligations sont une composante importante d’un portefeuille diversifié mais, comme le savent beaucoup d’investisseurs, elles ont traversé une période de faibles rendements. Les banques centrales du monde entier ont en effet maintenu leurs taux directeurs à des niveaux bas pendant environ une décennie après la crise financière mondiale. Cette période est heureusement révolue. Aujourd’hui, nous voyons des rendements à des niveaux inégalés depuis longtemps et, comme les rendements de départ sont un bon indice pour les rendements futurs, nos prévisions ont remonté pour les rendements obligataires à long terme. À ce sujet, il est important de noter que les obligations actuelles s’accompagnent de paiements de coupons substantiels et fournissent un flux régulier de revenus, ce qui signifie que les investisseurs n’ont pas besoin de compter autant sur une appréciation des cours.
Si nous avons bien passé le pic d’inflation, la lutte contre celle-ci n’est pas terminée et différents défis subsistent au niveau mondial. Aux États-Unis, l’inflation s’est avérée tenace et la croissance a étonnamment bien tenu, bien que la Fed ait porté le taux directeur à 5,5%. Pour ces raisons et pour atténuer le risque d’un assouplissement trop rapide des conditions financières, nous ne voyons pas la Fed pressée d’abaisser les taux. Notre hypothèse de base est qu’elle n’agira pas cette année, afin d’obtenir plus de certitude sur le fait que l’inflation se trouve sur une trajectoire durable vers les 2%. Pour l’Europe, nous avons un point de vue différent, illustré par la première baisse de taux en juin. La principale raison est le contexte macroéconomique, très différent de celui des États-Unis: la croissance dans l’espace européen a été faible et reste inférieure à la tendance, alors que les progrès en matière d’inflation ont été meilleurs.
Aux États-Unis, nous nous trouvons dans une dernière ligne droite éprouvante. Nous avions prévenu que le dernier kilomètre serait le plus difficile en ce qui concerne l’inflation et c’est ce que nous constatons actuellement. Si des progrès significatifs ont été réalisés par rapport à il y a deux ans, l’économie restant forte et la croissance des salaires toujours élevée, l’inflation devrait rester tenace – notamment dans les services. L’inflation de base («core PCE») pourrait finir l’année autour de 3%, ce qui est supérieur à l’objectif de la Fed. En Europe, l’inflation de l’énergie, des denrées alimentaires et des produits de base se situe désormais à des niveaux conformes à l’objectif de 2% de la BCE. La dynamique inflationniste a accéléré dans les services au cours des derniers mois, mais on peut s’attendre à un ralentissement pour qu’elle atteigne des niveaux compatibles avec l’objectif vers la fin de l’année. Pour la zone euro, l’inflation globale devrait atteindre 2% à la fin de l’année, même si sa persistance inattendue dans les services, des prix énergétiques plus élevés et un euro plus faible constituent des facteurs de risque à la hausse.
Conseil aux investisseurs sur les obligations dans cet environnement complexe
Pour les investisseurs, il est important de rester disciplinés et concentrés sur ce qu’ils peuvent contrôler, c’est-à-dire leur allocation d’actifs. Les obligations sont une composante importante d’un portefeuille diversifié. Ainsi, que ce soit avec des fonds, des ETF, des indices ou des papiers en direct, les investisseurs pourraient être incités à reconsidérer la question de l’obligataire dans leurs portefeuilles. Ensuite, ils ne devraient pas essayer d’anticiper l’évolution des obligations. Il est en effet difficile de prédire la politique des banques centrales et d’essayer de prévoir les taux d’intérêt, et la bonne nouvelle est que les investisseurs n’ont pas à le faire. Ils ont l’opportunité de profiter aujourd’hui de rendements intéressants, la composante du «revenu» étant de retour dans l’obligataire, ce qui est un amortisseur formidable de toute volatilité des cours que nous pourrions connaître à court terme.
Les titres d’État bénéficient de la meilleure qualité et représentent le facteur de diversification le plus pur. Actuellement, les rendements des obligations d’État sont beaucoup plus intéressants qu’ils ne l’ont été au cours de la dernière décennie. Les obligations d’entreprise offrent un rendement et un potentiel supplémentaires par rapport aux titres gouvernementaux, mais c’est parce qu’ils s’accompagnent de risques additionnels. Les investisseurs devraient donc s’assurer que ces risques sont bien rémunérés. Le crédit aux entreprises peut être considéré de manière globalement constructive. Les valorisations sont élevées, mais cela est justifié par des fondamentaux solides, un contexte macroéconomique et politique généralement en soutien et des facteurs techniques de marché favorables, autant d’éléments qui rendent le marché du crédit aux entreprises également attractif à l’heure actuelle.
Première étape de l’allocation d’actifs: envisager les obligations dans le portefeuille. Ensuite, quelques autres facteurs sont à prendre en compte, comme l’horizon de placement des investisseurs et leur tolérance au risque, deux éléments qui peuvent varier selon les individus et jouer sur l’allocation d’actifs. Les produits multi-actifs offrent toute une série d’allocations en obligations et en actions, afin de répondre aux besoins des investisseurs dans un seul portefeuille. Par exemple, si un investisseur est peu disposé au risque ou proche de la retraite, il peut opter pour une stratégie avec 80% d’obligations et 20% d’actions, ou vice versa pour un investisseur plus tolérant au risque et avec un horizon de placement beaucoup plus long.
Une chose est sûre: l’obligataire est une composante importante d’un portefeuille diversifié, les obligations étant un facteur de diversification efficace par rapport aux actions. Bien sûr, cette stratégie ne se vérifie pas tous les jours, mais elle fonctionne à long terme. L’année 2022 a certainement été très inhabituelle, mais pour l’investisseur à long terme, elle ne sera qu’une petite anomalie. Sur des périodes plus longues, les obligations ont servi de contrepoids, présentant des corrélations négatives par rapport aux actions lorsque cela était le plus nécessaire. Nous aimons comparer les obligations à une assurance. Souvent, les investisseurs doivent payer pour une protection et une diversification en renonçant à des rendements, mais actuellement, ils peuvent profiter de rendements attrayants ainsi que des avantages de la diversification sur le long terme.
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